Le traitement de violences conjugales en 2024 : comment accompagner les collaborateurs ?

C’est un sujet douloureux, qui relève de l’intime. Et souvent tabou, ou qui se vit en dehors du bureau. Qui est dur à partager avec ses collègues. Mais qui n’en a pas moins autant de conséquences très réelles dans le monde du travail.

Pour plus de la moitié des victimes, ces violences conjugales ont affecté le travail au moins de trois manières suivantes : retards, absentéismes, présentéisme. Et ce sans côté parfois le harcèlement via des sms incessants, des menaces sur le lieu de travail, l’interdiction d’aller travailler.

Le cout humain et financier est réelle non seulement pour la personne directement concernée mais aussi pour ses collègues les plus proches souvent démunis pour aider.

Qu’en est-il des nouvelles notions d’appréhension des violences conjugales tel que le Contrôle coercitif ? L’enfant peut-il ou doit il être impérativement entendu quand il a assisté aux violences ? Comment fonctionne les nouveaux pôle judiciaires spécialisés dans la lutte contre les violences intrafamiliales ? L’ordonnance de protection fonctionne t’elle ? Procédure pénale , civile, juge des enfants ? Comment fonctionnent ces procédures, ces juridictions, communiquent elles entre elles pour accélérer le suivi du dossier ?

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Réponses

Quelles sont les conséquences somatiques ou physiques chez une femme victime de violences conjugales qui peuvent être visibles au travail ?

Les violences conjugales peuvent avoir de graves conséquences, immédiates ou à plus long terme, sur la santé mentale et physique des femmes qui les subissent.

  • Traumatologie : ecchymoses, hématomes, brûlures, fractures, lésions cachées par les vêtements, plaies, que la victime justifie souvent par des chutes dans l’escalier.
  • Pathologies cliniques : affections pulmonaires, cardiaques, troubles du métabolisme… Le contrôle du conjoint et l’état dépressif font obstacle à la prise en charge de ces pathologies et au suivi d’un traitement.
  • Psychiatrie : troubles du sommeil, émotionnels (culpabilité, impuissance), psychosomatiques, cognitifs, troubles de l’alimentation, état de peur, d’angoisse, de silence, emprise des conduites additives (tabac, alcool, drogues, médicaments) qui seront dénoncées par l’agresseur pour discréditer la victime.
  • Gynécologie : douleurs pelviennes inexpliquées, troubles de la sexualité ou des règles, lésions traumatiques, infections génitales et urinaires. La victime cache ces violences, souvent accompagnée par un partenaire « prévenant » qui parle à sa place.
  • Obstétrique : la grossesse peut être un facteur déclenchant ou aggravant ; la fréquence des violences s’en trouve accrue et débouche sur des déclarations tardives de grossesse, des demandes d’IVG, des conduites addictives, des grossesses qui ne peuvent être menées à terme (mort fœtale) ou avec des retards de croissance in utéro.

Plus récemment identifiés et encore sous-estimés : les troubles psycho-traumatiques.

Les victimes de violences conjugales sont exposées à des conséquences traumatiques avec de lourdes répercussions sur leur santé pouvant représenter un risque vital (état de stress psycho-traumatique, dissociation traumatique, dépression, risque suicidaire, troubles de la personnalité, addictions, troubles du comportement avec mise en danger, accidents, maladies liées aux stress).

Les violences, à l’origine d’un stress extrême, imposent la mise en place de mécanismes neurobiologiques exceptionnels de sauvegarde (disjonction) et sont à l’origine d’une mémoire traumatique et d’une dissociation avec anesthésie émotionnelle et physique.

Les conduites dissociantes qui en découlent et qui s’imposent aux victimes, apparaissent souvent paradoxales, déroutantes et peuvent être qualifiées d’ambivalentes (confusion, tolérance, dépendance à l’agresseur, conduites à risques) pour les professionnel.le.s. Pourtant il s’agit de réactions normales à des situations anormales que sont les violences. Ces symptômes servent l’agresseur et desservent la victime, la rendant ainsi encore plus vulnérable.

Après la dépression, l’addiction est le deuxième trouble comorbide de ces états de psychotraumatismes. Tentatives de solution chimique à un état permanent de stress intérieur et de contrôle des symptômes, le recours répété aux drogues (alcool, médicaments…) est une forme de dissociation artificielle.

D’une façon générale les femmes sont plus stigmatisées que les hommes car la consommation de substances va à l’encontre des attentes sociétales associées aux femmes. La conjugaison de violences et de conduites addictives les pénalise plus encore, jusqu’à les déqualifier dans l’évaluation de leur compétence parentale.

Du point de vue économique et social, les conséquences des violences se traduisent par des situations de précarité et d’exclusion : difficultés financières, d’hébergement et de logement, isolement, difficultés administratives (obtention ou renouvellement de titre de séjour pour les femmes étrangères victimes de violences), d’insertion professionnelle…

La détérioration de la qualité de vie globale des victimes qui en découle leur fait perdre, en moyenne, quatre à cinq années de vie en bonne santé. Le taux de suicide des victimes est multiplié par cinq.

Il n’y a pas de profil type de victimes de violences. La meilleure façon de les repérer : le questionnement systématique.

Pourquoi utiliser le concept de contrôle coercitif plutôt que celui d'emprise ?

Le contrôle coercitif est défini comme un acte délibéré ou un schéma comportemental de contrôle, de contrainte ou de menace utilisé par un individu contre une personne, un/e partenaire intime ou un/e ex-partenaire, dans le but de la rendre dépendante, subordonnée et/ou de la priver de sa liberté d’action.

Les agresseurs intimident, humilient, surveillent, manipulent et/ou isolent afin d'exercer leur pouvoir et leur contrôle. Les tactiques, sur un laps de temps, peuvent être psychologiques, physiques, sexuelles, émotionnelles, administratives et/ou économiques.

L’auteur de contrôle coercitif isole souvent sa victime de toute forme de soutien, exploite ses ressources, l'empêche d'accéder à de nouvelles ressources, réglemente la vie quotidienne de la victime et la prive des moyens nécessaires pour accéder à l'indépendance, résister ou s’enfuir.

La notion ce controle coercitif permet d'inverser la charge de la preuve de l'a vitcime sur l'auteur contrairement à la notion d'emprise.

En effet la notion d'emprise impose à une victime souvent dissociée de devoir prouver ce qu'elle subit.

Le phénomènes d’emprise subis par les femmes victimes de violences conjugales restent encore très peu pris en compte, que ce soit dans le cadre des prises en charge médicales et psychologiques,
ou dans le cadre des procédures judiciaires.

Pourtant, il est essentiel, pour protéger efficacement et de reconnaître cette emprise -qui se définit comme un processus de colonisation psychique
par le conjoint violent qui a pour conséquence d’annihiler leur volonté - et de les en libérer par une
prise en charge psychothérapique adaptée.

Pour cela, il est nécessaire de bien connaître l’impact
psychotraumatique dévastateur des violences conjugales sur les victimes, sur leur santé, qu’elle soit
mentale ou physique, sur leur souffrance et sur leurs comportements.

LE CONTROLE COERCITIF PERMET DE DEFINIR PRECISEMENT LES PHENOMENES ET L'INTENSITE DE L'EMPRISE

Quels sont les répercussions économiques des violences conjugales sur l'organisation du travail ?

L’exposition aux violences conjugales est associée à un état physique dégradé,
notamment sur le plan du système musculo-squelettique, neurologique, sensoriel,circulatoire, génito-urinaire, digestif et gastro-intestinal (Coker et alii, 2000).

Les abus entraînent un accroissement du recours aux antidépresseurs et une importance des symptômes dépressifs.

La première évaluation française des
coûts directs médicaux repose sur le comptage (urgences et hospitalisations) et
l’imputation indirecte des consommations de soins. Parmi les coûts non valorisés par
manque de données, l’on trouve les arrêts de travail et les incapacités temporaires de
travail. La valorisation économique des événements morbides (coûts médicaux),
consécutifs aux violences conjugales, s’élevait à plus de 382 millions d’euros
(382 789 300) pour l’année 2021.

Les coûts directs

L’estimation des coûts directs non médicaux se ventile comme suit : l’activité des services de justice (divorces, condamnations, protection judiciaire), l’administration pénitentiaire, les services de police et de gendarmerie, l’hébergement d’urgence et d’insertion, le relogement et les prestations sociales.

Les coûts indirects

Les coûts indirects sont de nature à freiner « les opportunités de croissance
économique induites par les conséquences sanitaires des risques sociaux et médicaux
qu’il s’agisse du handicap, du décès prématuré ou des pertes de productivité, par le
prisme de la participation de l’individu au marché du travail » (Marissal et Chevalley,
2007). Le coût humain des violences conjugales en France s’élève à 304,7 millions
d’euros (décès, suicide de l’auteur, handicap, viols, fractures). Les pertes de
production non marchande avoisinent les 48 millions d’euros (estimation du temps
journalier domestique), les pertes de revenu consécutives aux incarcérations se
chiffrent à 36,1 millions, soit des coûts indirects annuels totaux de 388 millions
d’euros (388 086 600).

Contrairement à la première étude sur la question, la dernière évaluation des
répercussions économiques des violences conjugales (Nectoux et alii, 2010) a pris en
compte les pertes de production dues, notamment, à l’absentéisme ; soit une perte qui s’élève à plus de 778 millions d’euros. L’absentéisme est la conséquence d’un long
cheminement relativement à la relation violente : dépressions, fatigues, anxiété,
stress, etc. La diminution du bien-être, de la qualité de vie, la dégradation progressive
de la santé génèrent des coûts importants pour les collectivités et l’Etat.

Les coûts intangibles

Les méthodes utilisées pour mesurer les coûts intangibles visent à estimer
l’impact des violences conjugales sur le bien-être des individus, et à évaluer leur
sentiment de perte d’utilité associée à état de santé donné par rapport à un état de
santé parfait. L’accent est mis sur la capacité limitée à accomplir un certain nombre d’activités. Mais ces éléments sont difficilement quantifiables ; ils ne sont d’ailleurs pas mesurés en France.

Le dévoilement des situations de violences : dire ou ne pas dire ?

Le dévoilement des violences jouerait un rôle positif dans la capacité de
concentration des individus (Reeves et O’Leary-Kelly, 2009). Lorsque les
employées divulguent les abus subis, elles partagent leur histoire et ressentent de
l’espoir.

Ce comportement aurait des effets positifs, tant pour les employées que pour
les employeurs. En effet, ainsi réconfortées émotionnellement, les personnes seraient
plus enclines à modifier certains éléments de leur situation personnelle.

Une forte corrélation a même été démontrée entre le pouvoir économique et l’état mental positif lié à l’espoir ; deux composantes nécessaires pour briser le cycle de la violence.

Toutefois, dans la plupart des études, le niveau de dévoilement reste bas. Par ailleurs, les victimes sont davantage enclines à se confier à des collègues
ou à des supérieurs, qu’à des autorités organisationnelles telles que les gestionnaires des ressources humaines ou les responsables sécurité ; autorités jugées distantes et formelles. La proximité favorise la confidence : au sein de l’environnement social de travail, il est effectivement plus aisé de se confier à des personnes proches, avec qui l’on a l’habitude de communiquer, que de s’adresser à des instances froides et impersonnelles.

Pourquoi les victimes se dévoilent elles sur le lieu de travail ? Quelles sont leurs motivations ?

Les motifs de divulgation renvoient à
un besoin d’assistance ou à un besoin de justification. En effet, lorsque la demande
d’aide devient pressante, la personne lève plus facilement les résistances.

Les victimes se confient également pour justifier une performance médiocre, des absences répétées ou tout comportement qui pourrait apparaître anormal. Si la révélation des violences peut entraîner, dans certains cas, l’isolement social et une perception négative portée sur la personne victime, l’étude sus citée démontre, qu’à l’inverse, le dévoilement a des effets positifs, tels que l’amélioration du sentiment d’espérance ;

Processus rendu possible grâce à cette décharge émotionnelle. Le dévoilement
jouerait également un rôle positif dans l’amélioration de la capacité de concentration.

Ouvrir le dialogue et dévoiler ses difficultés sont des actions qui favorisent le
sentiment de « soutien social », phénomène qui consiste à obtenir en retour des informations et des « émotions positives » de la part de ses confidents.

« Le soutien social correspond à l’ensemble des fonctions aidantes qui sont réalisées par les personnes significatives de l’entourage d’une personne »

Mais s’il joue un rôle important dans l’estime de soi , il ne suffit cependant pas à recouvrer son identité propre.

Ça marche ou ça ne marche pas ?

En tant que professionnel, accompagner votre collègue ou la personne que vous suivez au commissariat pour porter plainte / être accompagnée lors du dépôt de plainte

Des pôle psycho-sociaux existent désormais dans la plupart des commissariats pour aider les victimes de violences conjugales. Trois personnes formées s’en occupent au quotidien et aident les femmes à franchir le pas, soit en parlant de ce qu’elles vivent, soit en portant plainte.

Si malgré ces dispositifs, la victime craint de porter plainte, vous êtes tout à fait habilitée à accompagner cette personne pour l’aider à franchir la porte du commissariat.

Pendant le dépôt de plainte, vous ne pouvez pas être présent mais précisément votre présence quelque soit votre statut ( AS, RH, Médecin du travail, simple collègue ) offrira à la victime une assise et un sas de décompression après avoir porté plainte extrêmement précieux.

Déontologiquement, que ce soit sur le plan du secret médical ou professionnel, aucune personne physique ou institution ne peut vous sanctionner d'avoir initié et accompagné une telle démarche.

S'ouvrir à la Médecine du travail de violences conjugales

Les violences intrafamiliales ne sont a priori pas un risque professionnel. Néanmoins aujourd’hui les services des santé au travail se doivent de voir la réalité du salarié dans sa globalité, dans son environnement professionnel mais également dans son environnement familial.

Témoignage d’un Médecin du Travail
"Une femme sur 10 est victime de violences conjugales et 52% de ces femmes sont salariées. On en voit donc dans nos visites. Et puis, une femme qui aurait été privée de ses papiers par son conjoint peut continuer à venir nous voir puisque nous n’avons pas besoin de carte vitale. Le maintien en emploi est pour moi une priorité. C’est un gage d’autonomie financière pour la femme victime."

Êtes-vous fréquemment confrontée aux violences intrafamiliales au cours de vos visites ?
Souvent non, mais sur 300 visites par mois j’en ai facilement deux ou trois qui me parlent de violences passées ou présentes.

Comment pouvez-vous suspecter ce type de violences si la victime ne vous confie pas ce qu’elle endure ?
De manière systématique, on demande toujours au salarié « comment ça va à la maison ? » Mais je peux aussi être interpellée par l’employeur. Sur le lieu de travail, il y a des signes qui peuvent alerter : une femme qui a souvent des bleus, des petites fractures, qui a des absences répétées, qui a un changement de comportement, qui s’isole ou alors le mari qui vient sur le lieu de travail pour menacer… Ces signes peuvent conduire l’employer à alerter le médecin du travail. »

Donc oui cette action sera utile car l’employeur sollicité par la médecine du travail pourra appuyer fortement des aides en intra, des solutions d’aménagement de votre temps de travail ou un logement en urgence

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